Construite en 1961 à Ivry-sur-Seine, dans l'essor des constructions sociales de l'après-guerre, la cité Gagarine est devenue un emblème de la banlieue rouge. En 1963, lors d'une visite historique, le cosmonaute Youri Gagarine, planta un arbre devant l'imposante façade de briques rouges. La cité Gagarine a été détruite en 2020. En2017, quand j'ai commencé à photographier les derniers locataires, il ne restait plus qu'une centaine de logements occupés sur les 384 que comprenait la cité. Tout allait disparaitre. En tant que photographe, la nécessité de faire œuvre de mémoire s'est imposée à moi.
© Marie-Pierre DIETERLÉ / Divergence
Yvette, 75 ans, vit à Gagarine depuis 20 ans avec son mari Daniel. Elle a été gardienne d'immeuble puis a travaillé dans une cantine scolaire. Yvette était là le jour de l'inauguration où le cosmonaute a planté son arbre. Elle se rappelle de la foule en liesse. Le cendrier appartenait aux parents de Daniel, conseillers municipaux à Ivry-sur-Seine. Pendant la seconde guerre mondiale, ils étaient obligé de cacher l'objet pour que les Allemands ne le trouvent pas. Son père a été fusillé le 11 août 1942 par les Allemands au fort de Suresnes du Mont Valérien.
Aicha, 65 ans, vit à Gagarine depuis 12 ans. Elle est arrivée d'Algérie en 1974. Elle a quatre enfants. Très attachée à sa cité, elle a refusé la première fois que les déménageurs entre dans son logement, elle n'était pas prête. Pour elle, c'est un quartier fragile avec des gens très touchés par la précarité mais d'une grande gentillesse. Le père d'Aïcha a combattu les occupants français en Algérie. Il a été tué par l'armée française. Aujourd'hui, elle aimerait faire des recherches et raconter l'histoire de son père.