
23 octobre 2021
Marc Chaumeil expose Paris révélé à Pomerol.

Paris révélé
Un paradoxe. Le 17 mars 2020, au moment où l’épidémie de Covid a contraint les habitants de la capitale à rentrer
chez eux, Paris est apparu. Comme sur les clichés que Charles Marville fixa durant la seconde moitié du XIXème
siècle, la ville s’est montrée vide, ramenée à ses murs, à ses voies, ses perspectives. Devant la lentille de Marville,
la foule grouillait pourtant mais les longs temps de pose de la photographie débutante « effaçaient » l’image des
êtres en mouvement. Le confinement de 2020 a ôté du paysage les humains eux-mêmes. On n’aurait jamais cru
voir cela un jour.
Je suis resté dans Paris confiné et j’ai photographié ce que je pensais être une suppression. Les grands axes
haussmanniens sans leur trafic, les trottoirs sans leurs piétons, les vitrines sans leurs lumières, les cafés sans leurs
terrasses, les quais déserts, les vastes places silencieuses. Je me suis placé sous les auvents des grands magasins
n’abritant plus un seul acheteur, face aux six voies du périphérique où ne passait plus qu’un camion toutes les dix
minutes. Au dessus d’un échangeur de l’A86, j’ai photographié une forêt de panneaux indicateurs et de voies
enchevêtrées ne menant plus personne nulle part. La tristesse des vitrines d’un coup éteintes et des bistrots
disparus témoignait en creux du caractère de Paris, la « ville latine la plus au nord » comme l’a écrit le New York
Times.
Pourtant, dans ces rues vides, on pouvait percevoir qu'une présence s'était affirmée. Celle de la beauté de Paris
simplement, de ce génie du lieu que l’agitation de la vie masque d’ordinaire. Un petit monsieur à vélo traversant
la place de la Concorde déserte m’a souri en levant le poing, réjoui dans cette somptuosité qui s'offrait à lui ce
jour-là comme un cadeau.
Mon projet consiste en un témoignage visuel de ce moment inédit de l’histoire de Paris, du moins en temp de paix.
J’ai réalisé mes reportages quotidiennement pendant les 55 jours du premier confinement, puis régulièrement
pendant le second à partir du 30 octobre ainsi que pendant la période des fêtes.
Marc Chaumeil