REPORTAGE : Strade Nere

Par  30 photographies - 15 octobre 2018

Strade Nere (projet en cour)

Mais quel est celui qui aura voulu céder à autrui le droit de lui ôter la vie?
[Cesare Beccaria, Des Délits et des Peines]

Le fait de donner volontairement la mort à autrui constitue un meurtre. Il est puni de trente ans de réclusion criminelle.
[Art 221-1 du Code Pénale de la République Française]

Le temps, indifférent, s'écoule sur la scène du crime, la tension du délit se fane, la mémoire des corps gisant sans vie sur le sol s’efface. Les enfants courent à nouveau dans les squares, les passants piétinent sans hésitation les taches de sang qui n'existent plus, la violence de ces instants se perd dans le passé.
«Chaque pavé de notre bonne ville de Paris est rouge»1. Chaque rue, chaque place, chaque carrefour a vu la peur d’un corps s'écroulant à terre et le regard de son meurtrier remplie par la colère, par le cupidité, par la jalousie, par la vengeance, par la folie, par la stupidité ou tout simplement par la loi.
En remontant le temps, la ville se retrouve recouverte de sang. Les chroniques se répètent comme des feuilletons mal écrits, les victimes et les bourreaux surgissent soudainement dans les entrefilets des journaux et dans les pages des livres d'histoire, ils se mélangent dans une intrigue qui suit la logique morbide du crime odieux et du cadavre célèbre.
La décapitation de Saint Denis en 250 après J.-C., le meurtre crapuleux de Zakaria Babamou en 2004, dans un parc sur les Champs Elysées, les milliers de personnes écartelées, pendues, guillotinées par la dynastie des Bourreaux Sanson en place de Grève, entre la pentecôte 1310 et le 22 Juillet 1830, les quatorze victimes de l’attentat de Fieschi contre Louis-Philippe en 1835 où les 140 du 13 Novembre 2015 dans les atacs simultanée effectués par le soi-disant Etat Islamique dans le Xeme et XIeme arrondissements de Paris, sans oublier l’assassinat en 2010, en Avenue de Bel-Air, d’un chauffeur de taxi dont personne dans la presse veut se souvenir le nom : il s’agit de faits appartenant tous à un même passé. Seul l’essence des lieux reste immuable, tel un témoin éternel dans un décor qui change au fil du temps.

J’ai marché avec les fantômes à la recherche de ce qui reste dans l’espace de l’acte le plus idiot qu’un homme puisse accomplir: tuer.