REPORTAGE : Une jeunesse ukrainienne

20 photographies - 10 septembre 2016

En 2015 et 2016, je suis allée à la rencontre de jeunes Ukrainien.ne.s de Kiev, de Lviv, et d’ailleurs, dans le cadre d’un projet photographique personnel, que je souhaitais initier. Je voulais comprendre et ressentir « ce que ça fait » de vivre dans un pays que l’on découvre en guerre en se réveillant un beau matin, et comment ces jeunes appréhendent cette réalité dans leur vie quotidienne. L’Ukraine qui, à l’instar des pays d’Europe occidentale, n’avait pas connu de conflits ouverts depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Toute une génération qui avait vécu dans une paix relative, et pour qui « la guerre » semblait quelque chose d’étrange, d’extérieur et lointain, voire d’exotique jusque là. Précisément jusqu’aux violentes manifestations anti-Ianoukovytch de la Place Maidan en 2013, aux allures de guerre civile et de guérilla urbaine, et auxquelles ont pris part beaucoup de ces jeunes, et moins jeunes, aux motivations alors assez diverses.

La suite de l’histoire est connue : ces manifestations vont déboucher sur la crise dans le Donbass, à l’Est du pays, coupant le pays en deux entités et deux réalités désormais bien distinctes, de part et d’autre d’une véritable ligne de front. Les Ukrainiens vont ensuite assister, médusés et impuissants, au délestage d’une partie de leur territoire, la Crimée, absorbée unilatéralement par le puissant voisin russe. Une guerre des tranchées s’enlise alors à l’Est, aux frontières des républiques auto-proclamées de Donestsk et Louhansk, et que le monde entier semble oublier… Jusqu’il y a quelques mois, le 24 février 2022, lorsque l’impensable s’est produit, remettant l’Ukraine en tête de gondole de l’actualité internationale, et suscitant une immense vague d’émotion de par le monde.

Outre les enjeux géopolitiques, ces sont les dimensions davantage sociologique et culturelle qu’il m’intéressait de documenter et de questionner au travers du médium et récit photographique. Cette après « génération Maidan », et la perte de ses illusions. Sa radicalisation et militarisation aussi.